Moins de vingt-quatre heures après l’annonce de sa composition, le gouvernement conduit par Sébastien Lecornu a remis sa démission, acceptée ce lundi 6 octobre par le président Emmanuel Macron. Une séquence inédite sous la Ve République qui replonge l’exécutif dans l’incertitude et attise les appels à des élections anticipées.
PARIS — Nommé le 9 septembre, Sébastien Lecornu aura été Premier ministre pendant moins d’un mois. L’Élysée a confirmé ce matin que le chef du gouvernement a présenté la démission de son équipe, au lendemain de la publication de la liste des ministres et quelques heures avant le premier Conseil des ministres prévu dans l’après-midi.
Dans son entourage, on évoque un contexte parlementaire ingouvernable, des réserves de partenaires potentiels et des critiques immédiates sur la composition d’un cabinet jugé « sans élan » par l’opposition. L’hypothèse d’une motion de censure rapide était ouvertement discutée à l’Assemblée, alors que le budget 2026 devait être présenté sans recours à l’article 49.3, selon l’engagement public du Premier ministre.
Réactions en chaîne, de la gauche à l’extrême droite
Dès l’annonce, l’opposition a occupé le terrain. Jean-Luc Mélenchon a réclamé « l’examen immédiat » de la motion de destitution visant le chef de l’État, déposée par une centaine de députés, estimant que « la situation l’exige ». Jordan Bardella a salué la fin d’un « premier ministre éphémère » et ciblé directement Emmanuel Macron, qu’il exhorte à dissoudre l’Assemblée nationale.
À droite, Bruno Retailleau (LR) a fustigé un « manque de confiance et de rupture », regrettant un « gouvernement de continuité » plutôt qu’un accord de méthode recherché au Parlement. De son côté, Gabriel Attal a parlé d’un « spectacle affligeant » donné « par l’ensemble de la classe politique », renvoyant majorité et oppositions à leurs responsabilités.
Les points de friction : méthode, casting et majorité introuvable
La crise tient autant à la méthode qu’au casting. L’annonce d’une équipe resserrée, conçue pour tester une coalition à géométrie variable, a fracturé d’éventuels soutiens, jusqu’à faire douter certains partenaires de centre droit. Plusieurs figures de l’opposition dénonçaient l’absence de signal fort et la reconduction de poids lourds macronistes, perçue comme un déni de la nouvelle donne parlementaire.
Dans ce climat, et face aux préparatifs de motions de censure, Sébastien Lecornu a choisi la sortie. Son pari — gouverner sans 49.3 en arrimant un compromis budgétaire — aura buté sur une arithmétique hostile et des postures déjà durcies à l’Assemblée.
Ce que cela change maintenant
- À l’Élysée, Emmanuel Macron doit décider s’il reconduit un Premier ministre chargé des affaires courantes avant de tenter une nouvelle désignation, ou s’il s’achemine, sous pression, vers une dissolution.
- Au Parlement, les groupes de gauche et d’extrême droite poussent à rejouer les urnes. Les centristes et une partie de la droite plaident pour un accord de responsabilité à durée limitée, centré sur le budget et les « textes d’urgence ».
- Sur les marchés, la séance a été chahutée à l’ouverture avant un rebond partiel, signe d’une volatilité politique désormais intégrée mais préoccupante pour les acteurs économiques.
Les phrases du jour
- « Après la démission de Sébastien Lecornu, nous demandons l’examen immédiat de la motion de destitution d’Emmanuel Macron. » — Jean-Luc Mélenchon.
- « Sans doute le Premier ministre éphémère n’avait pas de marge de manœuvre. » — Jordan Bardella.
- « Manque de confiance et de rupture. » — Bruno Retailleau (LR), au sujet du « nouveau » gouvernement.
- « Le spectacle affligeant donné par la classe politique. » — Gabriel Attal.
Les prochaines étapes
Un nouveau round de consultations est attendu à l’Élysée dans les heures à venir. Les scénarios sur la table :
- Nommer un nouveau Premier ministre pour tenter une coalition minimale autour d’un cap budgétaire ;
- Dissoudre et renvoyer les Français aux urnes, avec risque d’instabilité prolongée ;
- Gouvernement technique et calendrier borné pour franchir l’obstacle budgétaire avant un retour aux urnes.
À ce stade, aucune option ne fait consensus. Le pays aborde l’automne politique dans une incertitude rarement atteinte depuis le début du quinquennat.
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Rédaction Blue Radio (France) / Service Politique